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Les gens de l’IP — Kasia Rejzner, passionnée de mathématiques

Selon Kasia Rejzner, boursière invitée Emmy-Noether, si la société a davantage confiance dans les mathématiques, les femmes viendront à ce domaine (et surtout y resteront).

Pourquoi tant de filles se disent-elles mauvaises en mathématiques? Cette question taraude Kasia Rejzner, 31 ans, et pas seulement parce qu’elle est très, très bonne en math.

La rareté des femmes en mathématiques et en physique mathématique crée un cercle vicieux : comme les jeunes femmes voient peu de femmes collègues et mentors dans le domaine, elles hésitent souvent à se jeter dans le vide elles-mêmes, ce qui n’est pas pour augmenter le nombre de femmes collègues et mentors dans le domaine.

Kasia Rejzner, boursière invitée Emmy-Noether

C’est ce cercle vicieux que Kasia Rejzner cherche activement à briser. Cette auteure et professeure à l’Université de York, au Royaume-Uni, s’emploie souvent à rassurer les jeunes chercheuses, parce que même si les femmes ont beaucoup d’aptitudes pour les mathématiques, elles souffrent souvent d’un manque de confiance.

« Je crois, dit-elle, que nous sous-estimons l’importance de la confiance en soi et de paroles rassurantes, comme ‘Oui, fais-le, je crois en toi.’ J’y ai eu droit de la part de mon directeur de thèse de doctorat, un homme formidable. Je crois que la confiance en moi est ce que je lui dois de plus important. » [traduction]

Kasia Rejzner est née et a grandi en Pologne. Ses parents, tous deux architectes, croyaient que leur fille suivrait son penchant pour les arts dans sa vie professionnelle, mais sa curiosité naturelle l’a conduite vers les mathématiques et la physique, où elle peut exploiter d’une autre manière sa créativité.

Parfois, ses ambitions et ses capacités se sont heurtées à des attentes plus conservatrices envers les femmes, en particulier dans son milieu d’origine. Mais grâce au soutien de gens qui l’entouraient — y compris ses parents et ses pairs —, elle croit en son travail et à son droit de le poursuivre au niveau le plus élevé.

Oui, fait-elle remarquer, les hommes ont aussi besoin d’aide et de soutien, mais les femmes font face à des défis particuliers. Sur les 100 à 200 scientifiques dans le monde qui travaillent dans son domaine de recherche — les fondements mathématiques de la théorie quantique des champs et de la gravitation quantique —, elle peut énumérer 4 femmes, dont 2 ont des postes permanents.

« Peut-être qu’à cause de cette inégalité et du très petit nombre de femmes, dit-elle, les doutes sont plus grands. Lorsque nous aurons atteint un certain seuil et que la présence de femmes dans le domaine sera normale et naturelle, lorsqu’il y aura une certaine égalité, il n’y aura pas de problème. Mais entre-temps, je crois qu’il faut un soutien supplémentaire. » [traduction]

Changer l’équation

Mme Rejzner est arrivée à l’Institut Périmètre grâce à un appui de ce genre. À titre de boursière invitée Emmy-Noether, elle a fait 3 séjours scientifiques en 2016 et 2017 — coordonnés avec ses engagements à l’Université de York — pour travailler avec des chercheurs de l’Institut en gravitation quantique et en physique mathématique.

« Nous avons eu beaucoup d’échanges d’idées très constructifs », a-t-elle déclaré à la fin de son séjour de mai 2017. « C’est très rafraîchissant de pouvoir converser avec tant de personnes. Tous les jours, je rencontre quelqu’un avec qui j’entame une discussion. Les choses évoluent très vite, c’est vraiment extraordinaire. » [traduction]

En effet, pendant l’une de ces conversations, Kasia Rejzner a eu tout d’un coup l’idée d’organiser un atelier sur la gravitation quantique, afin d’amener plus de participants à la discussion. Elle s’est adressée à l’équipe de soutien administratif des activités scientifiques de l’Institut Périmètre, et moins de 2 semaines plus tard se tenait l’atelier Infrared Problems in QED and Quantum Gravity (Problèmes de l’infrarouge en EDQ et en gravitation quantique). Selon elle, cette expérience et l’atelier lui-même ont été des plus stimulants.

La vie d’un scientifique n’est pas facile. Il y a peu de stabilité au départ, et les occasions d’emploi obligent souvent à un déracinement. Cela peut constituer un défi particulier pour les femmes qui veulent fonder une famille ou qui ont déjà des enfants. Souvent, elles vont même jusqu’à abréger leurs congés de maternité pour rester au fait des progrès de la recherche.

Mais grâce à la mise en place d’aides spécifiques, espère Mme Rejzner, les femmes verront qu’elles ont leur place en sciences. Selon elle, la recherche scientifique est extrêmement gratifiante, et exige créativité et collaboration. Tant mieux si davantage de jeunes femmes décident de suivre son exemple et de se joindre à elle, à l’avant-garde des mathématiques et de la physique.

D’après elle, ce serait une honte que les femmes se privent de ce plaisir : « Une chose qui parfois me dérange vraiment, c’est la croyance populaire selon laquelle des mathématiques sont difficiles et qu’elles ne sont pas pour les filles. D’où cela vient-il? » [traduction]

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