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DESI ouvre ses 5 000 yeux pour capter les couleurs du cosmos

DESI (Dark Energy Spectroscopic Instrument – Spectroscope de l’énergie sombre), nouvel instrument d’exploration du ciel auquel travaillent entre autres 2 scientifiques de l’Institut Périmètre, cherchera à faire progresser notre connaissance de l’énergie sombre

Star trails take shape around the 14-story Mayall Telescope dome in a long-exposure image

Un nouvel instrument monté sur un télescope en Arizona vient de tourner vers le ciel son réseau robotisé de 5 000 « yeux » de fibres optiques pour capter les premières images de sa vision propre de la lumière galactique.

C’était le premier test de DESI (Dark Energy Spectroscopic Instrument – Spectroscope de l’énergie sombre). Attendu depuis longtemps, cet instrument est conçu pour étudier les mystères de l’énergie sombre, qui constitue environ 68 % de l’univers et en accélère l’expansion.


Légende :
Intensity = Intensité
Triangulum Galaxy (M33) = Galaxie du Triangle (M33)
Fiber # 160 = Fibre no 160
H and N+ = H et N+
Wavelength (Angstroms) = Longueur d’onde (ångströms)

Les 5 000 « yeux » spectroscopiques de DESI peuvent couvrir une région du ciel environ 38 fois plus grande que celle de la pleine lune. La partie supérieure de l’image ci-dessus montre le plan focal de DESI superposé sur le ciel nocturne. Chacun de ces yeux commandés de manière robotisée peut orienter un câble à fibres optiques sur un objet spécifique pour en capter la lumière. La lumière provenant d’une petite région de la galaxie du Triangle recueillie par un seul câble (point rouge) est décomposée en un spectre (partie inférieure de l’image) qui révèle les empreintes des éléments présents dans la galaxie et aide à évaluer la distance qu’il y a entre celle-ci et la Terre. Le spectre de test illustré ici a été recueilli par DESI le 22 octobre.
(Image : Équipe de DESI; Legacy Surveys; NASA/JPL-Caltech/UCLA)

L’équipe de DESI comprend près de 500 chercheurs de 75 institutions situées dans 13 pays, dont l’informaticien Dustin Lang et le professeur associé Will Percival de l’Institut Périmètre. Will Percival est également titulaire d’une chaire éminente d’astrophysique de l’Université de Waterloo et directeur du nouveau Centre d’astrophysique de Waterloo).

Les composantes de DESI sont conçues pour pointer automatiquement vers un ensemble présélectionné de galaxies à l’aide de 5 000 positionneurs robotisés qui exécutent un ballet chorégraphié. Elles utilisent des câbles à fibres optiques pour capter la lumière de chaque galaxie, puis la décomposent en milliers de bandes de couleur à l’aide de spectrographes conçus pour mesurer le décalage vers le rouge — décalage des couleurs vers des longueurs d’onde plus grandes (allant vers le rouge) de la lumière des objets qui s’éloignent de nous. Les scientifiques de l’équipe de DESI peuvent alors évaluer de combien l’univers s’est étendu pendant que la lumière de ces galaxies se dirigeait vers la Terre — et ainsi en déduire avec précision la distance entre la Terre et chacune de ces galaxies.

Les positionneurs robotisés de DESI peuvent être déplacés en quelques minutes de manière à recueillir la lumière d’un nouvel ensemble de 5 000 galaxies, avec une vitesse de balayage qui permettra de construire des cartes au-delà de 20 fois plus rapidement que toute autre expérience précédente.

Évidemment, pour faire pointer ce puissant instrument vers des ensembles présélectionnés de galaxies, il faut d’abord choisir ces galaxies. C’est là qu’intervient Dustin Lang.

Depuis 2014, M. Lang travaille avec une équipe d’astronomes sur une vaste campagne de cartographie du ciel. L’équipe a passé plus de 1 000 nuits à 3 télescopes de l’Arizona et du Chili pour observer un tiers du ciel — plus précisément le tiers du ciel le plus visible à partir de l’emplacement de DESI à l’Observatoire national de Kitt Peak, près de Tucson, en Arizona. Ces observations ont été effectuées à l’aide de 3 filtres de couleurs différentes et avec une sensibilité supérieure à celle de toutes les cartes du ciel existantes.

À partir de ces observations, l’équipe a produit des images bidimensionnelles des galaxies lointaines que DESI va observer. Ces images ont ensuite été transmises au Centre d’informatique scientifique du Centre de recherche national du Département de l’Énergie, où l’équipe a mis au point des logiciels pour étalonner les images, puis détecter et mesurer les étoiles et les galaxies qui y figurent. Ces mesures des formes et des couleurs des galaxies servent à décider quelles étoiles et galaxies sont susceptibles de se situer dans la fourchette de distances à mesurer à l’aide de DESI.

« Nous avons mesuré en tout plus d’un milliard d’étoiles et de galaxies, explique M. Lang. Parmi celles-ci, nous en choisissons 35 millions à suivre avec DESI. Nous arrivons à la phase passionnante au cours de laquelle DESI va observer les galaxies que nous avons choisies. Même si 35 millions de galaxies ne représentent qu’une petite fraction de tout ce qui a été détecté, cela constitue un énorme progrès par rapport au plus important relevé effectué à ce jour, SDSS (Sloan Digital Sky Survey – Relevé numérique du ciel Sloan), qui a recueilli les spectres d’environ 3 millions de galaxies en plus de 10 ans d’observations. » [traduction]

Entre-temps, Will Percival se prépare en vue des données scientifiques qui émergeront de ces observations. Depuis 3 ans, il codirige le groupe de travail qui met au point les techniques nécessaires pour extraire des données de DESI les signaux cosmologiques des galaxies.

« Les données de DESI sont tellement supérieures, en quantité et en qualité, à celles des relevés précédents que nous avons dû élaborer de nombreuses nouvelles méthodes d’analyse, dit M. Percival. Avec les derniers essais de DESI en cours et le début officiel des observations prévu au début de 2020, nous allons tous être de plus en plus occupés. » [traduction]

En donnant les distances entre la Terre et 35 millions de galaxies et 2,4 millions de quasars sur un tiers du ciel, DESI jettera un regard neuf sur le mystère de la matière sombre. Sur une période de 5 ans, ce nouvel instrument examinera en profondeur les débuts de l’univers — jusqu’à il y a environ 11 milliards d’années —, ce qui permettra de mesurer avec beaucoup de précision le rythme d’expansion de l’univers. La gravité a ralenti cette expansion dans l’univers primitif, mais l’énergie sombre l’a accélérée.

« La plus grande partie de la matière et de l’énergie de l’univers est sombre et inconnue, et des expériences de la prochaine génération telles que DESI constituent notre meilleure chance de percer ces mystères », a déclaré le directeur de DESI Michael Levi, du Laboratoire national Lawrence-Berkeley du Département de l’Énergie, institution qui coordonne la construction et l’exploitation de DESI. « Je suis ravi de voir cette nouvelle expérience prendre vie. » [traduction]

Une photo à longue exposition montre des traces d’étoiles qui entourent le dôme du télescope Mayall, d’une hauteur de 14 étages.
Une photo à longue exposition montre des traces d’étoiles qui entourent le dôme du télescope Mayall, d’une hauteur de 14 étages. (Image : P. Marenfeld et NOAO/AURA/NSF)

L’installation de DESI a commencé en février 2018 au télescope Nicholas-U.-Mayall de l’Observatoire national de Kitt Peak. Son premier test effectué le 22« octobre« 2019 a marqué le point culminant d’une décennie de planification, recherche, développement, installation et assemblage. Pour plus de détails à ce sujet, voir le communiqué de presse officiel (en anglais).

– Avec des dossiers du Laboratoire national Lawrence-Berkeley

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