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IRM : La physique a permis une innovation incroyable qui sauve des vies

Des dizaines de physiciens, médecins, chercheurs en médecine et ingénieurs ont été à l’origine des fondements scientifiques de l’IRM, puis des technologies qui en découlent.

Black and white picture of man cooking hot dogs on a large machine

Elle est maintenant d’utilisation courante — avec plus de 46 millions d’examens par année aux États-Unis et au Canada —, mais l’imagerie par résonance magnétique (IRM) a encore un petit air de magie. Elle permet de regarder à travers le corps pour voir non seulement les os, comme le fait la radiographie, mais aussi les tissus mous tels que le cerveau, les muscles et les divers organes, sans émettre de rayonnement nocif. À l’aide de calculs incroyables transformant des données brutes en images animées, l’IRM montre de minuscules détails des battements du cœur, ou même la forme de la pensée à mesure que le sang circule dans les parties les plus actives du cerveau.

Des dizaines de physiciens, médecins, chercheurs en médecine et ingénieurs ont été à l’origine des fondements scientifiques de l’IRM, puis des technologies qui en découlent. Il y a des brevets, des egos, et au moins 5 prix Nobel. Mais au tout début de l’histoire, l’IRM doit son incroyable existence à un garçon surnommé Izzy et au fait que le mot astronomie commence par un A.

Marnine bleue à IRM

Izzy est né sous le nom d’Israel Isaac Rabi, christianisé sous le prénom Isidor lors de son inscription à l’école publique. Ses parents, immigrants autrichiens, étaient des juifs orthodoxes pieux et pauvres. Ils vivaient à Brooklyn, arrondissement de la ville de New York. Enfant, Rabi avait de l’imagination et dévorait les livres. Il avait déjà mémorisé tous les livres qu’il y avait chez lui et dans sa classe — surtout des histoires bibliques de la création et des contes de la tradition yiddish — lorsqu’il a aperçu un de ses camarades de classe transportant un volume qu’il ne connaissait pas. D’où venait ce livre? De la bibliothèque publique. C’était en 1908, et Rabi avait 10 ans. Le monde était à la veille de changer.

Dans la petite bibliothèque Carnegie, Rabi a commencé par la lettre A et a rapidement lu tous les livres de fiction pour enfants. La tablette suivante contenait des ouvrages documentaires classés par sujet, en commençant par un livre d’astronomie sur Copernic et son modèle du système solaire. « Cela a orienté ma vie plus que toute autre chose », a-t-il écrit des décennies plus tard. « La lecture de ce petit livre. C’était si beau, si merveilleux, si simple! » [traduction] Son discours de bar-mitsva a porté sur la physique des lampes électriques.

Rabi a étudié la chimie, puis la physique, obtenant son doctorat en 1926. Il a vécu 2 ans en Europe, se plongeant dans le domaine nouveau et en pleine expansion de la mécanique quantique, et travaillant avec des géants tels que Bohr, Pauli et Heisenberg.

Rabi était particulièrement frappé par un nouveau résultat connu sous le nom d’expérience de Stern-Gerlach. On savait déjà que certaines particules, par exemple les électrons et les molécules, ont un moment magnétique : comme de minuscules aimants, elles ont un pôle nord et un pôle sud. L’expérience de Stern et Gerlach consiste à faire passer un faisceau de telles particules à travers un fort champ magnétique. On s’attendrait à ce que des particules semblables à de minuscules aimants se répartissent comme des aimants lorsqu’elles sont déviées par un champ magnétique : celles dont le pôle nord pointe tout droit vers le haut vont en haut, celles dont le pôle nord pointe vers le bas vont en bas, et celles dont le pôle pointe plus ou moins de côté vont plus ou moins de côté, atteignant diverses régions du détecteur placé à l’opposé de leur lieu d’émission. Mais ce n’est pas cela qui se passe. Les particules vont seulement vers le haut ou vers le bas. Pour un physicien, c’est un résultat stupéfiant. C’est comme si, après avoir découvert que ces particules peuvent se comporter comme des horloges, on se rendait compte qu’elles n’indiquent que 6 heures ou midi.

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Robert Oppenheimer, Isidor Rabi, H.M. Mott-Smith et Wolfgang Pauli au lac Zurich, en Suisse
Photo : Archives visuelles Emilio-Segrè de l’AIP, collection Fermi Films

Si l’on fait passer le faisceau de particules à travers un second champ magnétique, le résultat est encore plus étrange. Les particules ont un moment magnétique, mais ce moment ne peut avoir qu’un nombre limité de magnitudes et de directions. Il est quantifié. Il est quantique. Rabi s’est joint aux recherches sur les faisceaux de particules.

Stern et son équipe avaient fait appel à des champs magnétiques non uniformes pour en étudier les subtils effets. Rabi adopta une démarche différente, utilisant un champ uniforme et mettant le faisceau à un angle rasant, de sorte que les atomes soient déviés comme dans un prisme. Ce montage était plus net, plus facile à utiliser et plus précis. Cela allait devenir la signature de Rabi : réinventer des expériences pour les rendre plus nettes et plus astucieuses, à la recherche d’idées qui l’amèneraient, comme il l’a écrit, « plus près de Dieu  » [traduction].

« Vous vous battez contre un champion », disait-il à ses étudiants en physique. « Vous essayez de trouver comment Dieu a fait le monde, comme Jacob luttant avec l’ange. » [traduction] De retour à New York, Rabi a mis sur pied un laboratoire de faisceaux moléculaires à l’Université Columbia, caractérisant la nouvelle propriété du moment magnétique aussi appelé spin. Il a passé les années 1930 à améliorer sa technique. En 1937, il a ajouté à son montage quelque chose de nouveau au champ magnétique : une impulsion d’ondes radio. Il prédisait que les noyaux atomiques absorberaient cette impulsion et changeraient de spin. Et lorsque le spin reviendrait à son état d’origine, les noyaux réémettraient l’impulsion — signal que les expérimentateurs pourraient détecter. De plus, des matériaux différents absorberaient et réémettraient des impulsions de fréquences différentes. En détectant ces différentes fréquences, les scientifiques pourraient distinguer des matériaux divers — y compris à l’intérieur de solides.

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Isidor Rabi, avec son appareil générateur de faisceaux moléculaires
Photo : Archives visuelles Emilio-Segrè de l’AIP, collection Physics Today
Personne : Rabi, I.I. (Isidor Isaac), 1898-1988

C’est ce que l’on appelle la résonance magnétique nucléaire, ou RMN, qui a valu à Rabi le prix Nobel de physique 1944. C’est l’ancêtre de technologies comme celle des horloges atomiques utilisées dans les systèmes modernes de guidage, de la spectroscopie de RMN en science des matériaux et pour l’exploration pétrolière et gazière, et — évidemment — de l’IRM.

Même s’il a passé sa vie à lutter avec les anges, Rabi n’était pas un saint : il ne croyait pas que des femmes puissent devenir physiciennes et n’a jamais accepté d’étudiante; il était un excellent mentor mais un horrible enseignant.

À la fin de sa vie, Rabi a eu un cancer et a passé une IRM. La surface interne de la machine était réfléchissante. « Je me suis vu moi-même dans cette machine, a-t-il écrit. Jamais je n’aurais cru que mon travail donne cela. » [traduction]

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